Whispers would deafen me now
You don't make a sound
It's all so incredibly loud
You don't make a sound
It's all so incredibly loud
Ce n'est pas vraiment la peur de quitter Hellébore, ce n'est pas non plus celle de revoir ses parents : Lion est bercé d'amour et les problèmes ne semblent venir frapper à sa porte. C'est sans doute la peur de s'habituer aux paysages où l'herbe se meurt, étouffée dans le monstre goudron et au béton qui tente d'absorber ce qui reste de sauvage – comme perdre son innocence, comme perdre toute trace d'inattendu et de magie. Alors, Lion rentre les étés, le temps de se dire que c'est assez. Alors, Lion envoie des lettres avant tout et n'ose vraiment se séparer de ce qu'on lui a offert ici. Il voudrait sans doute pouvoir inviter ses parents ici, les asseoir à côté de lui lors des leçons. Balthazar aime pourtant encore même lorsque les visages sont loin de ses visions, les souvenirs pour gonfler le cœur et toujours des airs étroits pour se rappeler de tout ça. C'est que s'il pouvait, il collectionnerait sans doute les plus belles cassettes pour tenter d'emprisonner les voix des personnes adorées, il a dû renoncer à tout ça.
Alors, oui, Lion reste un peu. Lion voit les élèves défiler, les valises se fermer quand il n'arrive vraiment à se presser pour ranger la sienne. Alors, Lion profite des nuits solitaires, des étoiles juste pour lui, des autocollants phosphorescents au plafond. Pourtant, cette fois, il est mordu par le bleu minuit, pris dans le revers des vagues et jeté au fond des océans. L'esprit se tord. On lui a appris à ouvrir les yeux, regarder les lumières de la lune pour laisser passer les cauchemars et repartir aussitôt dans des mondes rêvés. Rien n'y fais, elle vient toujours se poser sur son estomac, jument du fond des jours, monstres voulant le croquer à pleines dents. Et quand les images ne veulent disparaître, quand il sent le vertige arrive, il repousse les couettes avec effroi. C'est qu'il ne voudrait pas passer sa vie sans arriver à se libérer de tout ça.
Il connaît le chemin. Lion a mémorisé de jour comment accéder le plus doucement possible à son refuge certain. Il sait encore, quelquefois, ne rien montrer de sa personne, s'enfuir en silence. C'est sans doute ce qui est commun à tous les enfants. Il dévale son deuxième étage, les mains agrippées aux rambardes, deviner les marches de chaque escalier. Et puis tomber une, deux fois, se rattraper à je-ne-sais-quoi, les coudes amortis par l'oreiller dont il faudra changer la taie aux premiers jours. Et puis passer la maison aux mille plantes, celle qui veut devenir un buisson, mais qui n'ose pas. Lion sait aussi qu'il faut réfléchir à chacun des pas, ne pas réveiller le bois, car il répétera ce qu'il ne faut pas. Dans le noir, Lion ne sait voir. Dans le noir, il sait se rappeler des murs sur son passage et de chacune des couvertures touchées ; il passe les doigts sur le nom des écrivains, les anciens livres et les bords des bibliothèques encastrées au mur. C'est facile de trouver la bonne porte en silence, sans doute plus délicat d'ouvrir furtivement le sas de la tanière. Lion retient son cœur pour ne pas qu'il parte avant lui. Il a encore pourtant les bras pris de frissons. Lion retient ses pas, ne pas s'affoler. Il veut retrouver là où au fil du temps, il a dû incruster sa silhouette comme la pluie filant dans les falaises. Sans un mot, galoper jusqu'à la couche désirée. Sans un mot, pousser la couette pour pouvoir grimper les escarpements des plus grands dangers. Son corps s'enfonce dans le matelas, laisse souffler les craquements du lit en bois. Il faut maintenant trouver du bout des bras le dos à affectionner. Lion, oui, du bout de ses doigts frais d'enfant caresse un instant les éclats de peau et les surfaces des sentiers de chair infructueuse, sans hésiter, savoir à qui tout appartient, sentir le reg et le zéphyr qui y siffle. Alors, il se hasarde au-delà, au milieu des mille couleurs de draps et place à sa tête l'édredon apporté comme maigre bouclier face aux ténèbres.
Lion reprend la place qu'il s'approprie comme si elle lui revenait de droit. Que ferait-il après tout si on lui interdisait l'endroit ? Il y place son nez, doucement, approcher les lèvres et fermer les yeux et encore toujours y placer les paumes pour voler innocemment les fragments des runes qu'il affectionne et puis pour voler un peu de mystique propre à Senrhys endormi là. Il se demande s'il peut apparaître dans ses rêves comme ça. Il se dit que ça serait bien, juste une fois. Et puis Lion y pose sa tête sur le matelas, l'oreille près des omoplates, abandonner l'idée de passer ses doigts le long des sillons entourant la colonne vertébrale qui ne lui appartient pas, ne pas en faire trop de peur de souiller ses prières. Doucement, Lion écoute le siège des passions et les plaintes tranquilles circuler. Lion s'endormirait encore sur les tambours pour résister d'y glisser des litanies chantées. Au creux du désert, oui, résister un instant au bleu se transformant. Son beau bleu de Prusse devient bleu poupon. Au creux du désert, réchauffer ses songes, laisser fondre les cauchemars, car ils n'existent pas là où tu te trouves.
Alors, oui, Lion reste un peu. Lion voit les élèves défiler, les valises se fermer quand il n'arrive vraiment à se presser pour ranger la sienne. Alors, Lion profite des nuits solitaires, des étoiles juste pour lui, des autocollants phosphorescents au plafond. Pourtant, cette fois, il est mordu par le bleu minuit, pris dans le revers des vagues et jeté au fond des océans. L'esprit se tord. On lui a appris à ouvrir les yeux, regarder les lumières de la lune pour laisser passer les cauchemars et repartir aussitôt dans des mondes rêvés. Rien n'y fais, elle vient toujours se poser sur son estomac, jument du fond des jours, monstres voulant le croquer à pleines dents. Et quand les images ne veulent disparaître, quand il sent le vertige arrive, il repousse les couettes avec effroi. C'est qu'il ne voudrait pas passer sa vie sans arriver à se libérer de tout ça.
Il connaît le chemin. Lion a mémorisé de jour comment accéder le plus doucement possible à son refuge certain. Il sait encore, quelquefois, ne rien montrer de sa personne, s'enfuir en silence. C'est sans doute ce qui est commun à tous les enfants. Il dévale son deuxième étage, les mains agrippées aux rambardes, deviner les marches de chaque escalier. Et puis tomber une, deux fois, se rattraper à je-ne-sais-quoi, les coudes amortis par l'oreiller dont il faudra changer la taie aux premiers jours. Et puis passer la maison aux mille plantes, celle qui veut devenir un buisson, mais qui n'ose pas. Lion sait aussi qu'il faut réfléchir à chacun des pas, ne pas réveiller le bois, car il répétera ce qu'il ne faut pas. Dans le noir, Lion ne sait voir. Dans le noir, il sait se rappeler des murs sur son passage et de chacune des couvertures touchées ; il passe les doigts sur le nom des écrivains, les anciens livres et les bords des bibliothèques encastrées au mur. C'est facile de trouver la bonne porte en silence, sans doute plus délicat d'ouvrir furtivement le sas de la tanière. Lion retient son cœur pour ne pas qu'il parte avant lui. Il a encore pourtant les bras pris de frissons. Lion retient ses pas, ne pas s'affoler. Il veut retrouver là où au fil du temps, il a dû incruster sa silhouette comme la pluie filant dans les falaises. Sans un mot, galoper jusqu'à la couche désirée. Sans un mot, pousser la couette pour pouvoir grimper les escarpements des plus grands dangers. Son corps s'enfonce dans le matelas, laisse souffler les craquements du lit en bois. Il faut maintenant trouver du bout des bras le dos à affectionner. Lion, oui, du bout de ses doigts frais d'enfant caresse un instant les éclats de peau et les surfaces des sentiers de chair infructueuse, sans hésiter, savoir à qui tout appartient, sentir le reg et le zéphyr qui y siffle. Alors, il se hasarde au-delà, au milieu des mille couleurs de draps et place à sa tête l'édredon apporté comme maigre bouclier face aux ténèbres.
Lion reprend la place qu'il s'approprie comme si elle lui revenait de droit. Que ferait-il après tout si on lui interdisait l'endroit ? Il y place son nez, doucement, approcher les lèvres et fermer les yeux et encore toujours y placer les paumes pour voler innocemment les fragments des runes qu'il affectionne et puis pour voler un peu de mystique propre à Senrhys endormi là. Il se demande s'il peut apparaître dans ses rêves comme ça. Il se dit que ça serait bien, juste une fois. Et puis Lion y pose sa tête sur le matelas, l'oreille près des omoplates, abandonner l'idée de passer ses doigts le long des sillons entourant la colonne vertébrale qui ne lui appartient pas, ne pas en faire trop de peur de souiller ses prières. Doucement, Lion écoute le siège des passions et les plaintes tranquilles circuler. Lion s'endormirait encore sur les tambours pour résister d'y glisser des litanies chantées. Au creux du désert, oui, résister un instant au bleu se transformant. Son beau bleu de Prusse devient bleu poupon. Au creux du désert, réchauffer ses songes, laisser fondre les cauchemars, car ils n'existent pas là où tu te trouves.
(( Allongé près de toi
Ta bouche et tes bras ))
// pantone 5395 u
Ta bouche et tes bras ))
// pantone 5395 u