T'avais pas réussit à proprement appliquer la formule de toute la semaine d'intégration, et ça te faisait chier, au fond. C'était pas une compétition, personne n'attendait rien de toi, c'était qu'un projet personnel pour le club, mais t'avais fini par prendre ça comme un challenge contre toi-même que tu te refusais à perdre. Et qu'importe si le Grand Bain était passé et que le but initial ne pouvait plus être atteint. Tu ferrai ce parfum qui te donne l'odeur de la personne que tu aimes.

Honnêtement, ça devrait pas te poser de problème. T'étais pas mauvais en enchantement d'habitude, et tu n'arrivais pas à comprendre pourquoi tu n'arrivais pas à enchanter cette simple bouteille de liquide dans les règles de l'art. Sans que ça soit la première fois que tu bloques sur un sort, il était tout de même assez inhabituel que tu t'acharnes de la sorte quand ce n'était pas un devoir à rendre. Alors te voilà, renifflant une énième tentative de cette satanée mixture. Et cette fois, tu crois que c'est la bonne. Une odeur sucrée, fruitée, légèrement acidulée. Cette odeur de bonbon chimique, petit arrière goût de fraise qui pique le nez. Si ce n'était pas le parfum préféré de Prudence, c'était au moins celui qu'il évoquait probablement à tous ceux qui la côtoyaient.

Et dans ton enthousiasme, tu es parti à la recherche de cobaye. Parce que t'as pas d'autres moyen de voir si ça s'adapte bien, ou si t'as bêtement donné à la mixture l'arôme de ton crush. Et qui de mieux qu'Ambre pour ce genre d'expérimentation? C'était l'occasion de taquiner un peu ton aîné. De réchauffer un peu de masque froid qu'il affichait si souvent. De retrouver ses confessions nocturnes de Llanfairpwllgwyngyll. Et au pire, tu trouverais bien Naveen ou Cyrus dans son dortoir s'il n'était pas là. Voir même peut-être Prudence en repartant.

Tu réajustes le col de ta chemise en lin naturel avant de frapper à la porte trois fois et d'ouvrir sans attendre d'y être invité. S'il y avait bien un endroit où tu ne prenais pas la peine d'attendre avant de passer la porte, c'était ici, presque plus que ton propre dortoir. Dégainant sans plus tarder ton flacon de ton sac à dos où tu avais également stocké de quoi faire un essai supplémentaire et une copie des instructions du grimmoire du club, tu saluais ton frère avec entrain avant de lui annoncer tes plans.

Ambre, mon grand-frère préféré que j'aime tant, aurais-tu le temps d'aider un pauvre enfant égaré?

Les cils battants, sourire crispé, mains aggripés sur le contenant, ton imitation de votre plus jeune soeur était plutôt bien réussit, si ce n'était pour la voix que tu peinais à garder naturelle quand tu montais tant dans les aïgus. Mais tu ne tardes pas à reprendre tes manières habituelles avec un rire silencieux avant de présenter ton parfum magique.

Plus sérieusement, tu pourrais me dire ce que ça sent pour toi? Je bloque sur un enchantement et j'aimerais savoir si ça marche cette fois.

Sa façon de claquer sévèrement le livre qu'il parcourait avec attention à ton arrivé, sourcils froncés, dos droit, tu ne peux t'empêcher de penser qu'Ambre aurait sûrement un charisme monstrueux s'il n'était pas resté enfermé dans son corps d'enfant. Ou en faisait-il plus pour compenser sa carrure? Le fait est que sur un autre, tu aurais probablement dégluti mal à l'aise, ravalant avec ta salive quelques pensées innoportunes.

Du haut de son mètre soixante, ton grand frère avait tout de même cette aura imposante qui te figea un instant quand il corrigea tes propos, avec une exactitude affolante. Tu devrais pas être impressionné par celui que tu dépasse d'un peu plus de ving centimètre maintenant, mais son autorité naturelle te terrifiait autant qu'elle te facinait. Alors quand la sentence tombe, t'aurai presque l'impression d'entendre le coup de marteau du juge qui accompagne sa déclaration : C'est raté.

C'est pas vrai...

Tu soupires, presque découragé par ce nouvel échec. T'étais pourtant sûr de toi cette fois. Les produits intermédiaires avaient les résultats escomptés. Alors pourquoi le produit final ne se comportait-il pas correctement.

Tu te laisses dramatiquement tomber sur le lit de ton adelphe, un râle las s'échapant de tes lèvres. C'était exactement la situation que tu voulais éviter. Pour ne pas lever les suspicion du vampire aux sens un peu trop aguisé, et au déductions tout aussi pointues. Mais rien ne sert d'essayer de détourner le sujet ou de mentir à l'aîné des Cadwallader, tu te ferait tout de suite griller.

Pour le Grand Bain, je voulais proposer un parfum qui prend l'odeur favorite de la personne qu'on aime. Ca aurait fait un atelier incroyable pour le club de maquillage pour aller avec la fabrication de parfum sur commande. Mais j'arrive pas à faire le bon mélange.

Tu te redresses, hissé sur tes coudes le temps de retirer ton sac à dos de tes épaules et sort tes notes sur les sorts transmit par les anciens du clubs pour appuyer tes propos.

Tu vois? On a le rouge à lèvre qui change de couleur à l'approche de ton crush ici, qui fonctionne très bien. Cette partie correspond globalement au crush tu vois? Pour changer ça en odeur, çe devrait pas être si compliqué, alors je me suis dit qu'en échangeant ce mouvement par celui-là, et cette incantation par celle-là, on devrait arriver à faire l'échange. Basé sur celui pour l'enchantement du parfum de purification et cette partie du phare à paupière qui change avec les émotions.

T'explique à grand coup de tapotage de parchemin sur les annotations chaotiques prises pendant tes différents essais. On voit que t'as perdu patience au fil des itérations, les mots en marge étant de lui en plus fouillit, barrés puis encore détaillé avec une encre d'autre couleur.

Mais visiblement, ça marche pas. Il a l'air de garder la même odeur que la première personne qui le sent, ça s'adapte pas à volonté comme je voudrais.

Crois-tu. L'idée que le vampire ait un petit quelque chose pour ta petite amie, ou qu'importe comment vous choisissiez d'appeler votre relation, ne t'étais pas venue à l'esprit. Après tout, comment aurais-tu pu savoir?

Ca fait bientôt deux semaines que je planche là-dessus, j'en ai MARRE. Quand j'ai senti la fraise chimique, j'ai cru que c'était bon, après tous les mélanges bizarres, parfums colorés, essence qui sentent le rose et fragnances colorantes...

Roulant mollement dans la direction de ton frère, le visage criant ton épuisement mental vis à vis de ce projet, tu te demandais s'il accepterait de te prêter main forte pour terminer ton expérience. Et si c'était une assez bonne divertion pour ne pas qu'il te questionne sur la personne qui se cachait derrière l'odeur dans ta bouteille.

Ambreeeeeeeeeeee... Aide moiiiiiiiiii

Le ton autoritaire d'Ambre a cet effet sur tous de tout de suite ramener ses auditeur à l'ordre. Alors quand il te demande si tu as de quoi recommencer l'expérience, tu hoches vivement de la tête et sors le matériel sans tarder. Le dortoir n'est peut-être pas le meilleur endroit pour pratiquer, mais tu as trop confiance en la compétence de ton aîné pour y penser.

Sa proposition, bien que pas très flatteuse sur tes propres capacités, ne te paraît pas complétement déraisonnable. Et s'il ne s'agit que de ça, après tout, ça serait un soulagement. Une question de coup de poignet, ça s'arrange rapidement. Celui d'Ambre est définitivement plus fluide, plus naturel que le tiens, et tu te prends à déjà internaliser sa façon de faire pour pouvoir l'imiter à ton tours.

Sauf qu'au moment de renifler la mixture, rien n'a changé. La même odeur acidulée, de mélange de fraise synthétique et de citron. Et tu sais, au fond de toi, que le vampire aurait dû sentir d'où il était, le résultat de son point de vue. Tu le sais, mais le fait qu'il n'ait pas annoncé ce que ça donnait pour lui ne te rassure pas, et te pousse dans tes retranchements.

Dans une action incontrôlée, alors, tu pose une main sur le flacon, pour empêcher le parfum de s'en échapper, et jette un regard malicieux au brun, les sourcils levés.

Toujours tagada... Mais dis-moi, à quoi devrait sentir le tiens, hein?

Tu regrette vite, très vite ta remarque, et ça se voit sur ton visage. Qu'est ce qu'il t'a prit, Robin, toi qui voulait tellement éviter le sujet? Toi qui essayait tant bien que mal quelques minutes auparavant de rester sur le chemin de la préparation pure, sans s'engager sur celui qui pouvait découler de la nature de cette dernière.

Peut-être qu'au fond de toi, t'avais envie d'en parler, au fond. T'avais envie de fièrement parader à cette personne en qui tu étais certain de pouvoir faire confiance. Parce que tu étais si heureux de ta relation avec Prudence, de la mutualité de vos sentiment. Mais tu avais promis, et tout à coup, tu te sentais terriblement coupable d'avoir mit si volontairement à risque votre petit secret pour pouvoir profiter d'un peu de... quoi au juste?

Je veux dire, c'est ça la méthode d'une expérience, non? Hypothèse d'abord, vérification en suite, hein? Si ça se trouve, ça fonctionne juste pas parce que tu n'aimes personne?

T'as déjà vu Ambre te regarder avec ces yeux-là, et c'était rarement bon signe. Et au cas où t'en sois pas tout à fait sûr, la dilatation de ses canines quand il te montre les crocs suffit à te figer un sourire tendu sur le visage.

Tu ravales bruyamment ta salive avant qu'il ne se mette à rire. T'aimes pas la tournure des événements, et tu n'as que toi à blâmer dans ce foutoir. Et son interruption pour te dire d'arrêter les conneries te tend d'autant plus. Agitant la tête de haut en bas, silencieusement, tu le laisses prendre la fiole quand il te l'arrache des mains, sans discuter.

Vanille, comme les bougies. C'était donc une question de mouvement, et ça te rassure. De savoir que t'étais pas loin. Que t'avais appelé la bonne personne pour t'aider. Même si au fond de toi, t'étais en colère, de pas avoir pu y arriver par toi-même. Ambre, toujours meilleur que toi quelque part. Ca ne changeait pas, au fil des années. La faussé qui vous séparait restait toujours aussi large, qu'importe tes efforts.

Dis-moi, est-ce que tu crush sur Prudence ?

Tu t'étouffes, Robin, tout à coup sorti de tes pensées. Ton visage change de couleur, jusqu'à la pointe de tes oreilles, et tes prunelles se passionnent tout à coup pour le rebord du bureau de ton frère, loin de son regard.

Prudence???????

Main plaquée sur le torse, tête orientée légèrement en arrière, tu t'indigne bien mal de cette supposition. Et t'en as conscience, bien sûr, mais tu ne sais pas comment réagir autrement.

Pfffffffff! Trop pas. Je veux dire... Prudence quoi haha.

Tu tentes une œillade dans sa direction, pour tenter de jauger de sa réaction. Evidement, ça ne peux pas prendre. Il a cette perspicacité naturelle, et ses sens super développé pour détecter le mensonge. Alors sur toi...

Y a plein de gens qui aiment l'odeur de la fraise de toute façon. C'est pas parce que t'en connaît une que je connais que DE SUITE... En plus, bon, si c'était Prudence, hein, soyons honnête, pourquoi je crushrais sur elle maintenant alors que ça fait des années? E-et même si c'était le cas, pourquoi ELLE, elle ressentirait la même chose après tout ce temps? C'est soit impossible soit inutile, hahaha...

Ca brûle tes lèvres, le mensonge. Ca attaque ta langue et tout ton intérieur, Robin, mais tu t'entêtes en vain. Et tu sais, qu'au fond, ça ne va faire qu'énerver le vampire en face de toi

Je veux dire... J'ai des yeux pour voir qu'elle est jolie, hein, mais ... tu vois ce que je veux dire?

Tu peux dire, à sa façon de te regarder, qu'il n'a pas mordu à l'hammeçon. Qui aurait pu y croire, vraiment? Tu le savais, dès le moment où tu as ouvert la bouche pour lui répondre. Que tes joues bouillantes auraient vendu la mèche. Que tes bégaiement auraient suffit à prouver ta culpabilité. Et pourtant, tu te retrouves presque surpris, face à son expression accusatrice.

Tu n'aimes pas le voir se fermer de la sorte, mais tu ne peux que te reprocher cette réaction, quand tu es le premier à ne pas être honête avec ton adelphe. Alors quand il te fixe, avec ce regard glacial et ce sourire cynique, tu te contente de baisser les yeux, coupable.

Et tu ressens la blessure de tes mots dans ceux qu'il te rétorque. Tu te sens terriblement mal, et d'un autre côte, comme insulté qu'il résume tes sentiments envers Prudence à une simple histoire d'hormones. C'est contradictoire, et tu en as plus que conscience. Comment lui reprocher, quand tu es le premier à ne pas adresser l'éléphant dans la pièce?

Mais quand ton aîné te remet le flacon dans les mains que tu reçois avec un maigre remerciement, souhaitant la réussite de ta mixture, t'as presque l'impression qu'il t'attaque. C'est pourtant pas les mots qu'ils emploi, mais t'as cette désagréable impression que quelque chose cloque, plus loin que ton arrangement avec la vérité. Parce qu'il ne le relève pas, ni cette fois, ni dans sa répliqué suivante. Et ton subconscient a probablement remarqué que ce n'est pas sa réaction habituelle à ce genre de manquement.

Euh... oui. Enfin, non, mais je voulais juste que tu saches que s'il y avait un changement majeur dans ma vie sentimentale dont je puisses te parler, tu serais le premier au courant.

Tes ongles tout juste coupés du matin tapottent nerveusement sur le contenant de la potion avant que tu ne te lèves, lentement, pour fourrer la bouteille dans ton sac.

Je te fais confiance, Ambre, plus que quiconque, ok? J'espère que toi aussi. Alors s'il y a quelque chose qui va pas entre nous...

Tu hausses les épaules, en te retournant vers le vampire, une moue troublée sur le visage. Ca fait longtemps que tu te demande comment ammorcer cette conversation, et pourtant, tu crains ce que tu pourrais entendre. Parce que chaque jour qui passe semble t'éloigner un peu plus d'Ambre.

On peut en parler.