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    At least there's pretty lights ~ [solo en cours]

    Anonymous
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    At least there's pretty lights ~ [solo en cours] Empty At least there's pretty lights ~ [solo en cours]

    Message par Invité Ven 18 Sep - 2:11

    Elle est face à la colline, au milieu de la tourmente. Le vent fouette son visage, arrache son manteau, s’infiltre dans ses poumons lorsqu’elle entrouvre les lèvres, menaçant de les faire exploser. La pluie recouvre ses lunettes roses, l’empêchant d’y voir clair. Elle n’a pas le temps de les retirer que leur verre cède au rythme d’un coup de tonnerre, envoyant des éclats dans ses yeux. Sa vision se teinte de rouge puis redevient claire alors qu’elle sent ses pieds décoller du sol. Juste à temps, elle s’agrippe à l’herbe. La tête en bas tandis que ses pieds sont happés par la force au-dessus. Elle avance, prise par prise. Elle veut voir ce qui se trouve au sommet de la butte. Des brins d’herbe restent en main à chaque fois qu’elle resserre sa poignée, un peu plus loin. Ses lèvres bougent mais le son ne sort pas. Elle se sent hurler, pourtant, mais la tempête parle plus fort qu’elle ne pourra jamais crier. Et alors qu’elle atteint le sommet de la colline, le vent la happe enfin. Ses mains arrachent de la terre par poignée, dans une tentative désespérée de rester arrimée au sol. Mais c’est un effort futile. Elle est projetée, poupée de chiffon dans la violence du vent. Juste avant d’être balancée dans la colère du ciel, elle a juste le temps de voir ce qui se trouve au sommet.

    Un cercle de pierres.




    Erin Kelly se réveilla en sursaut, en laissant s’échapper un cri.

    Envie de vomir.

    Dans sa main droite, la feuille de brouillon roulée en boule, maltraitée, qu’elle a empoigné dans son sommeil. Sous son visage, sa feuille de notes, ornée d’un point humide en son centre, la faute à la salive ayant coulé à la faveur de sa torpeur. On pouvait lire dessus "Réaménagement de la bibli". Des gribouillages improbables la recouvraient, gribouillages parmi lesquels on pouvait toutefois distinguer la forme de polygones supposés représenter tables, étagères, kiosques et des flèches en tous sens.

    Elle se redressa dans sa chaise et prit conscience de son mal de dos lancinant. Son bras droit, de l’épaule jusqu’au bout des doigts, lui faisait également souffrir le martyre. Elle avait également mal aux yeux, mais impossible de savoir si c’était dû à sa fatigue, ou s’il s’agissait d’une affliction purement psychologique liée à son cauchemar.

    Pas d’envie de dormir.

    Erin se leva. Lentement, fastidieusement. Encore un peu dans le coma, mais ça allait partir. Une fois debout, elle prit une grande inspiration, puis souffla. Lentement. Elle regarda sa montre. 3H34.

    "Fuck."

    Nuit blanche en perspective.

    Envie de boire.

    Elle se massa les yeux. D’un coup, elle sentit quelque chose agripper son épaule, et manqua de frapper dans le vide, par réflexe. Elle se calma en sentant la boule de plumes lui caresser le creux du cou. Dagda. La jeune femme gratta le haut du crâne de la petite chouette.

    "Merci… Laisse-moi un peu d’espace s’il-te-plaît. J’ai des trucs à faire puis on va sortir un peu."

    Dagda laissa s’échapper un petit hululement, puis s’envola jusqu’à son perchoir, plus loin dans la pénombre de la maison. Sa maîtresse se rendit dans la cuisine et but quelques gorgées d’eau à même le robinet. Elle laissa couler l’eau froide et passa sa main endolorie dessous. Après quelques secondes, ses paupières tombèrent d’elle-même et des images de la colline sous la pluie s’imposèrent à son esprit. Un spasme la parcourut et elle rouvrit les yeux. Son cœur battait la chamade. Elle plaça sa tête sous le robinet et resta là quelques instants, ses longs cheveux alourdis par l’eau raclant le fond de l’évier.

    Elle finit par couper l’arrivée d’eau. Lentement, elle redressa la tête puis alla dans la salle de bain, balança une serviette propre sur son crâne et frotta vigoureusement. Elle n’avait pas la tête à utiliser la magie. Dans cet état, elle risquait de faire des erreurs idiotes. Erin eut le déplaisir d’apercevoir son reflet dans le miroir. Elle avait mauvaise mine. L’air en colère contre quelque chose. Une fois ses cheveux à peu près secs, elle se donna trois coups de peigne, deux de brosse, présenta son majeur tendu à son reflet et quitta la salle de bain.

    Elle enfila un hoodie confortable et chaud par-dessus son haut de pyjama et un jogging par-dessus son bas. Elle enroula une écharpe autour de son cou et enfila une paire de baskets. Elle ne prit pas ses lunettes fétiches, son cauchemar lui ayant laissé un souvenir désagréable, trop récent. La bibliothécaire se saisit d’une bière dans son frigo et, après l’avoir décapsulée d’un coup sec contre le meuble de l’entrée, ouvrit la porte et s’engouffra dehors, rejointe expressément par Dagda avant qu’elle ne referme derrière elle.

    Elle avait besoin de marcher un peu.
    Anonymous
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    At least there's pretty lights ~ [solo en cours] Empty Re: At least there's pretty lights ~ [solo en cours]

    Message par Invité Ven 18 Sep - 22:33

    Son souffle produisait une fumée froide à peine sorti de ses lèvres. Dans ces volutes, elle avait l’impression de revoir des scènes du passé. Les plaines brumeuses de l’Irlande. Les rideaux diaphanes de sa chambre d’enfant. La vitre embuée derrière laquelle elle avait aperçu la montre, il y a 19 ans. Noël 2008 et le rideau de neige au dehors de la maison familiale. Oscar sachant déjà lire et compter.

    D’un battement d’ailes, Dagda dissipa l’air condensé, et avec lui toute l’Irlande. La chouette tourna pendant quelques instants sans but précis autour d’Erin avant d’aller se perdre dans les ombres de la nuit. Des festivités de l’obscurité que seules ces créatures pouvaient comprendre.

    La lune était clairement visible dans le ciel nocturne, sans le moindre nuage pour venir perturber son éclat. Erin regarda le ciel et eut une pensée pour les étudiants loups-garous. Puis elle regarda sa montre et la brandit vers le ciel de sorte à aligner son cadran avec le satellite de marbre. Elle eut une pensée pour Cyrano de Bergerac, sourit, et reprit sa marche après avoir pris une gorgée de sa bière. En honneur au plus grand des philosophes, physiciens, rimeurs, bretteurs et musiciens.

    Erin n’avait pas quitté Hellébore depuis qu’elle avait 10 ans. Même lors de ses rares visites à sa famille, même lorsqu’elle étudiait en France, elle était à Hellébore. Elle partait d’Hellébore avec l’intention d’y revenir, travaillait à l’étranger pour avoir le droit de rester au sein de l’école. Elle était à l’aise, à Hellébore. Mais qu’est-ce qui lui donnait vraiment envie de rester à tout jamais ?

    Elle pourchassait un sentiment d’appartenance. Un besoin d’amour débordant. L’envie qu’on compte sur elle et qu’en retour elle puisse compter sur autrui, sans se soucier d’être déçue, d’être triste, d’être trahie, abandonnée. Mais elle ne pourrait jamais être tranquille. Jamais connaître la satisfaction d’avoir accompli son objectif. Sa première année avait été compliquée, mais celles qui allaient suivre seraient sans nul doute les plus dures à vivre de toutes.

    Maintenant qu’elle était connue des étudiants et qu’elle les connaissait, ses années à Hellébore promettaient d’être des crescendo de plaisir, s’achevant sur une coda de violence émotionnelle.

    Elle les aimait tant, ces petits jeunes. L’idée de voir des générations entière d’élèves disparaître chaque année lui était insupportable. Comble de l’horreur, c’était ceux qui se rapprochaient le plus de son âge qui allaient disparaître le plus vite. Et en même temps, elle allait lentement s’éloigner de leur époque. 5 ans d’écart avec les plus vieux élèves, ce n’était pas grand-chose, quand bien même Max la taquinait gentiment à ce sujet.
    Mais 6, 7, 8, 9… 10.

    Elle reprit une gorgée de bière.

    Si peu de lumières dans la Dunleen nocturne. Elle arriva devant la maison de Gareth, plongée dans le noir elle aussi. Elle fit un pas vers la palissade blanche. Un deuxième.

    Puis passa son chemin.

    Elle pourrait toujours transmettre son savoir. Aider les élèves à voler de leurs propres ailes en les menant vers le livre parfait… Mais si à l’heure actuelle, elle estimait faire un très bon travail, n’était-ce pas aussi parce qu’elle était jeune ? À peine plus vieille qu’eux, personne n’était froissé qu’elle se penche par-dessus l’épaule des étudiants pour leur recommander un ouvrage, questionner l’avancée de leurs travaux, leur glisser un bonbon. Mais quand elle aurait 30 ans, qu’en serait-il de ce rapport privilégié ? Lorsque les premières rides apparaîtraient sur son visage, ce dernier resterait-il aussi avenant ? Quand elle serait un peu moins jeune, un peu moins dynamique, serait-elle encore Erin Kelly de la bibliothèque d’Hellébore ?

    Perdre cette complicité serait un bouleversement pour elle. Elle faisait ce métier pour l’interaction humaine avant d’aimer être entourée de vieux livres. À quoi bon être la seule à pouvoir en profiter ? Elle n’avait pas assez d’une vie pour tout lire, mais en s’y mettant à plusieurs, ils pouvaient…

    Des éclats de rire sortaient de la fenêtre ouverte de la maison devant laquelle elle passait. Un foyer encore éclairé. Un couple, des amis, une famille ?

    Erin but deux gorgées.



      La date/heure actuelle est Mer 8 Mai - 13:16